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Que faire lorsque l'acquéreur renonce à la vente pour refus de prêt ?

Dernière mise à jour : 1 oct. 2022



Vous avez signé le compromis de vente pour le bien immobilier que vous aviez mis en vente et, hélas pour vous, votre acheteur n'était pas un footballeur professionnel 😋 ! Il a eu besoin d’aller voir les banques pour faire un crédit immobilier. D'ailleurs l'obtention de ce financement bancaire a constitué une des conditions suspensives insérée dans le compromis. Or, pour des raisons qui ne nous regardent pas, votre acheteur n'a obtenu aucune offre de prêt. Dès lors, la vente tombe à l'eau. Que se passe-t-il alors ? Comment l'acheteur doit-il vous avertir officiellement de la mauvaise nouvelle ? N'y a-t-il aucun recours contre d'éventuelles manipulations de sa part et plus exactement le fait qu'il invoque abusivement le refus de prêt ? On vous en dit un peu plus dans cet article.


Pour rappel, lorsque l'offre d'achat d'un acquéreur a été acceptée par le vendeur, les deux parties peuvent officialiser leur envie commune de faire affaire en signant un avant-contrat : un compromis ou une promesse de vente.


Les conditions suspensives de l'avant-contrat


L'avant-contrat permet deux choses :

  • il scelle un accord préparant la signature de l'acte authentique de vente - celui-ci pouvant être difficilement signé sans préparation compte tenu des nombreux documents et démarches de vérification nécessaires ;

  • il régit les relations entre les deux contractants (l'acheteur et le vendeur) durant cette période intermédiaire.

De manière plus générale, on peut dire que l'avant-contrat sert à protéger les intérêts des parties impliquées dans la vente, notamment en insérant des conditions suspensives qui permettront à chacune d'elles de se rétracter si l'une des conditions mentionnées ne se réalise pas.


Dans les faits, les conditions suspensives demeurent essentiellement des garde-fous pour les acquéreurs.


Parmi les conditions suspensives, l'une des plus courantes est celle qui permet à l'acheteur de mettre un terme au processus de vente dès lors qu'il n'aura pas obtenu les conditions de prêt bancaire déterminées dans l'avant-contrat : durée et taux d'emprunt notamment.


Si l’acquéreur ne reçoit aucune offre de prêt conforme aux stipulations de la promesse, la condition d’obtention d’un prêt ne se réalise, de telle sorte que la promesse est caduque (Cour d'appel Versailles, 3ème Chambre, 22.11.2011, RG : 10/01480).


Que doit faire l'acheteur lorsque le prêt lui a été refusé ?


Pour faire valoir son droit de rétractation et annuler le compromis de vente pour refus de prêt, l'acheteur doit annuler le processus de vente dans les plus brefs délais en le notifiant au vendeur et à l’intermédiaire de la transaction (la plupart du temps le notaire) - lorsqu'il y en a un.


Pour ce faire, le vendeur (ou plus souvent son notaire) doit envoyer au vendeur (ou plus souvent à son notaire) une lettre d'annulation de l'avant-contrat par recommandé avec accusé de réception dans laquelle il doit invoquer la raison de l’annulation et demander le remboursement de l’acompte dans le compromis de vente.


Par ailleurs, le courrier indiquant le refus officiel de l’établissement financier devra être joint à la lettre d’annulation.


En effet, c'est à l'acquéreur de faire la preuve des demandes effectuées. Il doit démontrer au vendeur son impossibilité d’obtenir un financement en présentant des comptes rendus détaillés provenant de une ou plusieurs banques. En effet, aucun texte n’oblige l’acquéreur à s’adresser à plusieurs banques. Néanmoins, l’avant-contrat peut en indiquer un nombre minimal, généralement deux ou trois. Si rien n’est précisé, le refus d’une seule banque est suffisant pour permettre à l'acheteur de se retirer de la vente sans pénalité (Cour d’appel de Toulouse, 17 septembre 2007, no 06/02860).


En procédant de la sorte, l’acheteur se couvre de toute faute et de fait rend le compromis de vente caduc. Le vendeur ne peut s’opposer à cette décision et doit la respecter, il ne pourra en aucun cas demander des dédommagements à l’acheteur pour les frais et la perte de temps engendrée.


Que peut faire le vendeur lorsque le refus de prêt est abusif ?


Dans la très grande partie des ventes suspendues pour conditions de prêt non réalisées, le vendeur ne doit et ne peut rien faire. Hélas, le refus de prêt n'est pas exceptionnel ! S'il avait dû faire quelque chose, le vendeur aurait dû le faire avant d'accepter l'offre d'achat en se renseignant autant que possible sur la solvabilité de l'acquéreur. Chose plus facile à dire qu’à faire !


👉 Petit conseil Si aucune banque ne souhaite financer le projet de l’acheteur, c’est que sa situation ne le permet pas. Ce peut être dû à son âge, l'instabilité ou la faiblesse de ses revenus, les crédits déjà en cours ou des impayés trop fréquents. D'où l'intérêt pour le vendeur de jauger la solvabilité d'acquéreurs potentiels avant de lancer le process de vente.


Toutefois, le vendeur qui estime que l’acheteur invoque abusivement un refus de prêt peut agir contre lui en justice. Encore faut-il prouver que le refus de prêt a été abusif autrement dit en partie "organisé" par l'acheteur.


Lorsqu’un contentieux relatif à la condition suspensive de prêt est soumis à un tribunal, les tribunaux procèdent à une analyse des causes du refus de prêt. Le débat porte alors sur la question suivante : les demandes produites par l’acquéreur à sa banque sont-elles conformes aux modalités de financement indiquées dans l'avant-contrat ?


Dans un arrêt du 3 mai 2018 (Cass. civ. 3, 03-05-2018, n° 17-15.603), la Cour de cassation a apporté quelques précisions sur les preuves qui concernent cette phase : l'acquéreur doit prouver qu'il a déposé une demande de prêt conforme aux stipulations contractuelles, c'est-à-dire une demande de prêt portant à la fois sur le montant, le taux, et la durée du financement mentionné dans la promesse de vente.


L’acquéreur est fautif si le contenu de sa demande ne respecte pas les conditions et modalités prévues à l'avant-contrat. Il peut s’agir par exemple d’une demande de prêt d’un montant plus élevé (Cass. 3ème civ. 19 mai 1999 n° 97- 147529), d’une durée moins importante, soumis à un taux n’entrant pas dans la fourchette mentionnée dans l'avant-contrat, ou à un échéancier plus bas.


Il doit également produire des refus de prêt, mais peut très bien, si la lettre de refus n'est pas assez précise, compléter ultérieurement la preuve de ce que le refus de prêt portait bien sur un prêt répondant aux trois caractéristiques de montant, de taux et de délais, produire des attestations complémentaires de la ou les banques qui ont refusé le prêt.


L’acquéreur peut également être considéré comme fautif lorsque le juge constate une collusion frauduleuse avec la banque : une banque refuse une demande de prêt sous prétexte d’un problème de santé affectant l’acquéreur, mais lui accorde un prêt d’un montant plus important, quatre mois après son refus (Cass. 3ème civ. 3 décembre 2002 N°0113103).


Si l'acquéreur ne parvient pas à prouver qu'il a bel et bien respecté les conditions de recherche d'un prêt, la condition suspensive ne s’étant pas réalisée par sa faute, le vendeur peut exiger soit la poursuite forcée de la vente (quand l’avant-contrat est un compromis qui, juridiquement, vaut vente), soit l’annulation du processus de cession en gardant l’indemnité d’immobilisation à titre de compensation (qu’il s’agisse d’un compromis ou d’une promesse). Dans certains cas, il pourra également réclamer des dommages et intérêts.


Que peut faire le vendeur lorsque la preuve de refus de prêt intervient tardivement ?


L'autre imbroglio autour de la condition suspensive de prêt peut porter sur le retard de la preuve de prêt effectuée en bonne et due forme par l'acquéreur. En effet, lorsque ce dernier n’informe que très tardivement son vendeur d’un refus de prêt, et met ainsi en avant la défaillance de la condition suspensive, le vendeur a tendance à considérer que l’acquéreur est fautif.


L’acquéreur pourrait en effet invoquer dans cette hypothèse la lenteur de la banque dans l’instruction de sa demande pour justifier du retard dans la délivrance des informations et pièces.


En cas d'émission ou transmission tardive de l’offre prêt, la jurisprudence fait parfois preuve d’une certaine tolérance vis-à-vis de l’acquéreur retardataire, notamment en l’absence de clause de formalisme .La Cour de cassation considère que ce retard ne suffit pas à caractériser la faute de l’acquéreur, il faut regarder les circonstances de ce retard, (Cass. 3ème civ. 11 mai 2006 n°05-12629).


La Cour de Cassation a même admis la réalisation d’une condition suspensive alors que l’offre n’avait été émise et portée à la connaissance du vendeur que quatre jours après l’expiration du délai, au motif que la banque avait informé l’acquéreur de l’obtention de son prêt avant l’expiration dudit délai (Cass.3ème civ. n° 02-11815, 24 septembre 2003).


La prorogation tacite du délai de réalisation de la condition suspensive est parfois retenue, notamment lorsque le vendeur ne réagit pas au dépassement du délai. Se faisant, l’acheteur peut faire constater que la vente est parfaite, le prêt ayant été obtenu dans les délais tacitement prolongés (Cass. 3ème civ 7 juin 2000 N° 98-19773 et Doc 21 Cass. 12 septembre 2006 N°05-16317).


👉 Petit conseil Il est possible de pallier à l’inertie de l’acquéreur au terme du délai, en indiquant une date butoir suivant expiration du délai, au-delà de laquelle à défaut pour l’acquéreur d’avoir informé, soit d’un refus de prêt, soit d’une offre de prêt, la vente sera considérée comme caduque de plein droit.


Bonne vente ✍️


 

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